Coudre un pull en été cela peut être une bonne idée… surtout si tu vis à San Francisco ou dans des climats similaires. Je te parle cette semaine de ma dernière création et je t’apprends à réaliser des appliqués aériens top tendance et facile à faire. Ah et aussi, on dévoile les dessous du quartier chinois de San Francisco. En route Simone !
C’est un article en trois temps, sens-toi libre de lire uniquement ce qui t’intéresse. On commence par la pluie et le beau temps, on enchaine avec la couture d’un pull maison, on finit par un point sur l’histoire du quartier de Chinatown à San Francisco.
Pourquoi coudre un pull à San Francisco en été est une bonne idée
Alors Alicia tu es mignonne, mais un pull en plein été, ce n’est pas vraiment ce que j’envisage de coudre là, maintenant, tout de suite. Pour le moment je rêve de robes aériennes, de débardeurs vaporeux et de maillots de bain minimalistes, pas de pull en pilou pilou !
Et pourtant si tu habites (ou visites) San Francisco, c’est ce qu’il te faudra réaliser…
Bienvenu au royaume du printemps perpétuel
Depuis que j’ai posé mes valises dans la belle embrumée, j’ai découvert ce que « temps frais » signifie. Comprends-moi, je ne me plains absolument pas. Le temps San Franciscain est aussi proche du nirvana Aliciesque que faire se peut. Le ciel est bleu. Le soleil brille. Il ne pleut jamais (« je télétravaille car il pleut aujourd‘hui » est une excuse tout à fait acceptable ici).
Et c’est comme ça toute l’année.
Oui mais, par contre, ne vous attendez pas à du 25°, vous serez déçue ! Les mois de septembre à décembre sont un enchantement : en plein milieu de journée, il fait enfin chaud et on peut enlever les couches supérieures (écharpe et veste, je n’ai pas mis un manteau depuis deux ans). Mais passé 17h, patatra, le vent se remet à souffler ou la brume s’installe et il fait soudainement 15°.
Le reste de l’année oscille autour des 17°.
Gare à toi, touriste imprudent
Du coup, les touristes sont très facilement repérables dans la ville. Venant de la Baie où ils profitent d’un bon 30° installé, ils débarquent du Caltrain frigorifiés et se ruent sur le premier vendeur de sweat « San Francisco » du coin de la rue (ce monsieur doit avoir fait fortune depuis le temps…)
J’appelle ça le printemps perpétuel.
D’ailleurs toi qui habite la Bretagne ou les Hauts de France, tu vois surement de quoi je parle : même en été, on ne se départit pas de sa petite laine pour rester confort toute la journée. Et c’est la même pour les pays chauds. Quelle amère surprise lorsque tu découvres à ton corps défendant que les cinémas Singapouriens (30°c toute l’année à l’extérieur) sont réglés à un impitoyable 15°c, clim’ oblige….
Construire son pull maison
Un pull donc. Réalisé dans un tissu typiquement utilisé pour créer les « hoodies » portés par les tech aficionados de la Baie.
J’ai réalisé le patron maison, en travaillant un devant et dos tout simple à partir d’un buste de t-shirt de base :
- Le milieu dos et milieu devant du patron sont décalés de 3cm en partant de la ligne de pli pour créer l’effet « loose »
- La taille n’est pas marquée (couture toute droite entre le dessous du bras et l’ourlet du bas)
- Le décolleté est transformé en col bateau en utilisant la courbe du dos devant et derrière et en ajustant sur moi directement
Travailler son effet de manche
Le vrai travail a été réalisé sur les manches que je voulais légèrement « ballon ». Je suis partie de patrons vintages pour avoir une manche resserrée en bas et ballon en haut.
J’ai fait un prototype en papier pour me rendre compte du volume.
Bon d’ailleurs c’était un peu traître, j’aurai pu aller un peu plus loin mais le patron papier me donnait l’impression de créer un monstre importable.
Une fois que le prototype m’a satisfait, Je me suis lancée dans la découpe de la manche. Plutôt que de froncer le haut de la manche comme sur le modèle, j’ai intégré l’embu (le trop plein de tissu en haut de la manche) en créant un pli creux en haut de la manche.
Créer des empiècements sans se prendre la tête
Mais une fois les manches finies, c’était toujours trop simple.
J’ai donc opté pour une petite déco à base tissu en maille. Avais-je déjà fait des appliqués avant ? Non on était en mode totale expérimentation, ce que j’aime le plus avec la couture…
J’ai travaillé sur 3 formats de prototypes pour voir quelle taille allait rendre un effet « plume de corbeau » dont j’avais envie.
Dans l’idée, je voulais créer des ailes d’oiseaux, en superposant les couches pour créer un effet de transparence. Je suis fascinée depuis un certain temps par les créations de la collections « Volatiles » de la marque française le Bestiaire. Et pour une couturière le tentation de juste trop forte de le… faire soit même
… Et je brulais d’adapter ça à mes moyens plus limités ! La maille s’est très bien prêtée au jeu. J’ai dessiné à la craie la forme avant de procéder à la découpe des « plumes ».
J’ai découpé les éléments un par un en coupant à raz du bord. La maille ne fait pas de franges, c’était donc facile d’avoir de joli bord nets.
Ensuite c’est le Fun Part où on peut jouer avec le positionnement des éléments, décider si on veut une épaule ou les deux.
J’ai choisi de faire descendre les plumes sur le doc également, pour rappeler le motif.
Et de devant, voici ce que cela donne…
Où l’on découvre les politiques urbaines ségrégationnistes américaines peu reluisantes
Comment le quartier de Chinatown a-t-il pu garder autant sa cohérence et son charme tout asiatique ? Et bien parce que jusque très récemment, les sino-américains et les immigrés venus d’Asie avait pour interdiction formelle d’habiter ailleurs que dans un carré délimité de la ville, un « ghetto chinois ».
Devant l’insalubrité de la situation (plusieurs familles vivant dans de microscopiques single occupancy room) les politiques urbaines ont fini par changer. Mais malheureusement pas les mentalités. Jusque dans les années 60, les promoteurs immobiliers se débrouillaient pour refuser de vendre aux couples perçus comme « asiatiques » de peur de faire baisser la valeur d’un bien. De même, les voisins cherchaient à pousser dehors les nouveaux venus « étrangers », de peur de dévaluer leur quartier.
Une belle démonstration d’ouverture d’esprit…
Cela m’a rappelé que si la ségrégation blancs/noirs aux Etats-Unis est un concept qui nous est familier, il ne faut pas oublier son pendant blancs/asiatiques tout aussi violent. Et je ne te parle même pas des américano-japonais internés dans des camps durant la seconde guerre mondiale de peur qu’ils ne « collaborent ».
Pour en savoir plus :
- Un documentaire Netflix « The Racial Wealth Gap » sur le difficile accès à la propriété des noirs américains (il fait partie de la série « explained », tous très pertinents)
- Les camps d’internement des américains d’origine japonaise durant la seconde guerre mondiale
- L’évolution des quartiers asiatiques à San Francisco (à l’origine une exposition de ma bibliothèque chérie, la Main Library de SF)
- Le Walking Tour sur Chinatown (gratuit et génial)
Alors ? Prête à te faire un petit pull pour la saison ?
La bise
Alicia
Top ton article !! Et comme je suis bretonne je connais bien le pull en été 😉
Bref je note l’idée car avec les vacances qui arrivent je vais avoir le temps de faire un peu de couture !
ah ah Merci Romy ! oui c’est souvent en vacances qu’on progresse le mieux ;-). Tu nous montreras le résultat de tes expérimentations ? la bise. Alicia