Cirque du Soleil & Musée Grévin : parcours d’une costumière pas comme les autres

Ça fait quoi de vivre de sa passion ? On en avait déjà discuté avec mon arrivée à l’atelier du A.C.T (à relire ici) et avec Emilie pour l’atelier des Vertugadins (dispo ici). Ce coup-ci on va rencontrer une costumière un peu particulière. Et une super Nana aussi ! Musée Grévin, spectacle du Super Bowl, Disney… A 35 ans, le CV de Marion a déjà de quoi en faire rêver plus d’un / d’une ! Comment en est-elle arrivée là ? Le quotidien d’une costumière ça ressemble à quoi ? Allez, si vous êtes sages, je vous raconte : il était une fois….

« Mon premier contrat ? Un spectacle de marionnettes ! »

On a tendance à penser que les costumes se limitent au cinéma, au théâtre ou à Halloween… Mais on a tort ! Mais encore ? Et bien le premier contrat de Marion concernait… un spectacle de marionnettes. Et oui, leurs costumes ne se trouvent pas vraiment en magasin, il faut donc les créer.

© Hariss B

Mais revenons un peu en arrière : à la base, Marion voulait être coiffeuse. Un stage de 3ème plus tard, elle découvre sa vrai passion : la couture. BEP, Bac Pro, au fil de ses études, son projet professionnel (j’ai horreur de ce mot, donc disons “ ce qu’elle veut faire de sa vie”) s’affine. Attirée par des couturiers comme Thierry Mugler, elle opte pour le costume. ça tombe bien, la France et sa tradition de haute couture ont d’excellentes formations dans le domaine. Bon, le problème, c’est que “prépa costume” ça n’existe pas vraiment. Elle est donc rentrée dans le vif du sujet avec une formation “entretien et rénovation du costume” qui lui permet au final d’intégrer le Saint Graal : le Diplôme Métier d’art du Costume.

Marion, c’est elle, ici en pleine action sur une robe de mariée © Lalatiana Razafinjato

Habilleuse, lingère… Il faut gagner en technique et intégrer le milieu !

Après ses études, Marion a enchaîné de nombreux contrats courts, comme c’est souvent le cas dans le milieu. Elle a été lingère à l’opéra par exemple où on apprend comment repasser un tutu sans tout brûler (pour celles qui seraient intéressées c’est une histoire de on commence par la culotte et ensuite couche par couche en remontant vers le dessus.)

Le spectacle OVO pour lequel Marion a travaillé. Picture credit : Benoit Fontaine © 2009 Cirque du Soleil Inc. Costume credit : Liz Vandal © 2009 Cirque du Soleil

L’atout à développer dans le métier me raconte-elle c’est d’apprendre à se vendre, par ton travail, par la manière dont tu en parles aussi. C’est aussi important que de coudre finalement. Si les contrats en intermittence sont légion (mais pas toujours désagréables, ils donnent une grande flexibilité), on peut aussi trouver quelques CDI. Et hop, c’est comme ça que Marion passe habilleuse chez Disney. Là-bas, elle gère les costumes des participants à la parade :

Disney c’est un véritable microcosme, on rencontre des tas de gens différents. On a aussi de belles surprises, comme la foi où Michael Jackson est passé en coulisse avec ses enfants. Et oui. lui aussi il avait le droit d’assister au spectacle ! Les danseurs étaient comme des fous, c’était dingue.

Bienvenue dans la Haute Couture du Cirque

Pour ses 27 printemps, Marion avait envie de changer d’air. Elle plaque tout et part s’installer à Montréal. Montréal la ville de … Et bien oui, du Cirque du Soleil. Pour couvrir les besoins de leur vingtaine de spectacles, leurs équipes ne suffisent pas. L’atelier indépendant de Marion comptait 3 personnes à son arrivée, ils sont maintenant près de 100.

Picture credit : OSA Images Costume credit : Liz Vandal © 2009 Cirque du Soleil

C’est en travaillant pour le Cirque du Soleil que j’ai appris la Haute Couture version Cirque. Toutes les techniques les plus créatives sont développées pour créer des costumes extraordinaires : impression sur lycra, teinture de la soie…. J’ai mis 1 an avant d’être vraiment à l’aise avec toutes les techniques qu’ils utilisent.”

Autant pour ceux qui voudraient faire croire que la couture s’apprend en 3 vidéos Youtube !

Si elle ne créait pas directement le design du costume, Marion devait analyser comment construire des pièces très complexes : “ La blouse que vous portez tous les jours a en général 4 morceaux de tissus à assembler. Pour un costume de criquet par exemple, tout en volume 3D, ce sont 50 ou même 100 morceaux de tissus qui arrivent dans un sac. A nous après de trouver comment assembler toutes les pièces du puzzle !

Picture credit : Benoit Fontaine © 2009 Cirque du Soleil Inc. Costume credit : Liz Vandal © 2009 Cirque du Soleil

Dans ce show à l’américaine, l’exigence est poussée jusqu’au bout : “ Toutes les semaines, un responsable du Cirque du Soleil venait vérifier que la qualité était au rendez-vous. Et on avait intérêt à faire du bon travail car les retouches supplémentaires n’étaient pas payées !

Elle a aussi travaillé pour les danseurs de Madonna durant son show pour le SuperBowl : “La-bas ton âge importe peu, si tu fais rapidement tes preuves, tu peux te retrouver comme moi chef d’équipe au bout d’1 an à peine. J’ai aussi formé d’autres costumiers par exemple. Une expérience qui m’aurait difficilement été confiée en France qui aime les règles bien établies.”

Même les poupées de cire ont leur couturier personnel

Aujourd’hui Marion est revenue en France. Elle travaille à plein temps pour le Musée Grévin qui ouvre de nouvelles antennes à travers le monde.

Dans chaque nouveau musée, comme à Prague , on va créer des personnages actuels et historiques, qu’il faut bien habiller. Pour les personnalités vivantes, parfois ils nous fournissent leurs tenues, mais heureusement  pas tout le temps!

Et c’est là que le travail de détective commence. Il faut s’inspirer du style de la personnalité. “Une fois qu’on a choisi le look, je m’occupe de la création du costume de A à Z”. Ce n’est pas comme faire un vêtement “wear lemonade”, on ne vous fournit pas un patron. Il faut extrapoler à partir d’une photo sans pouvoir toucher le tissu. Dessiner un patron, trouver le tissu le plus approchant. Une statue de cire n’est pas “molle” et pas toujours totalement symétrique, il faut donc aussi ajuster le vêtement avec ces contraintes.

Un des préférées de Marion parmi ses dernières créations est celle de Katy Perry. Un body en strass repeint pour recréer les motifs “bonbon”. Il a mis presque deux mois à être réalisé.

Incursion dans les robes de mariées

Le nouveau dada de Marion ? Un peu de robes de mariées pour ses amies, même si elles habitent encore au Canada (si si c’est possible !)

© Lalatiana Razafinjato

 

“j’adore mon métier, et au début de ma carrière j’ai changé souvent d’employeur parce que tu dois prouver tes compétences pour que l’on te rappelle. Parfois tu as la chance de te poser dans un atelier où on te garde plus que d’habitude. Créer avec ses mains et sa tête voilà la grande kiff de la profession. Savoir par “quel bout prendre un tissu. être pointilleuse. La récompense c’est que si tu donnes le meilleur de toi même, tu peux transformer un carré de tissus en une fleur, un pantalon, un chapeau : tout ce que ton imagination te souffle.”  

Marion a cree cette robe « 2 en 1 » avec une autre amis couturière, avec un délicat body en dentelle© Lalatiana Razafinjato
© Lalatiana Razafinjato

Et pour finir une astuce de pro ?

Oui ! Repérer les coupons de grand couturier. En farfouillant dans les boutiques autour du marché Saint Pierre, on peut tomber sur le même rouleau que celui qui a créé la dernière robe Dior ou Givenchy. Alors on fonce et on farfouille ! Chez Mergault Couture notamment.

C’est bon toi aussi tu veux devenir costumière ? Pas encore ? Bon heureusement j’ai d’autres personnes extra à te présenter, suis le blog et tu verras 😉

La semaine prochaine, je vous emmène en voyage au Pérou d’où je reviens tout juste. Un pays où le tissu est roi, vous allez voir pourquoi. On ira aussi à Miami voir des murs tagués de folie.

D’ici là, la bise

A la semaine prochaine!

Alicia

 

Un commentaire Ajouter le vôtre
    1. Ah ah avec plaisir Nicolas :-). C’était une chouette rencontre pour moi aussi. Je suis partie d’une de ses premieres remarques  » tu sais, je ne sais pas si on peux dire que je suis une costumière hors du commun », je l’ai un peu pris comme un challenge, parce que pour moi c’était le cas alors je me suis dis que peut être mon article lui ferait changer d’avis…

  1. je ne sais pas qui vous êtes pour Marion , mais j’aime beaucoup cet interview , nous les parents ne savons pas si nos enfants vont prendre une bonne direction dans le monde du travail , Marion prend beaucoup à coeur son travail , elle est perfectionniste , elle nous a permis de visiter une infime partie du canada .
    encore merci pour elle .

    1. Merci, ça me fait bien plaisir ce que vous me dites là :-). On s’est rencontré via une amie commune qui a travaillé avec Marion et que je connais à San Francisco.

    1. Oui c’était une belle rencontre :-). J’ai une autre nana en tête (voir même 4 ou 5 ;-)) ça sera intéressant aussi j’espère !

Un avis, une question? A vous le micro !